J’ai déjà payé des intérêts sur ma carte de crédit, mais je ne me souviens plus quand. Je règle le solde en entier chaque mois depuis toujours, sauf de rares exceptions qui remontent à plus d’une dizaine d’années. J’ai une marge de crédit qui sert occasionnellement et sur laquelle je ne laisse jamais trainer une dette plus que quelques jours. Je ne néglige aucune facture. Mon hypothèque se rembourse sans accrocs par prélèvements automatiques.
Je suis loin d’être parfait dans la gestion de mon argent. Mais quand j’ai commandé mon dossier de crédit il y a 10 mois, je respirais la confiance de la p’tite bolle de la classe qui termine son examen de chimie 30 minutes avant les autres. Puis j’ai reçu ma note : 778 sur 900. J’étais déçu.
Le score est excellent et me permet d’avoir facilement accès à du crédit à des conditions avantageuses. Mais sur une échelle sur 100, ça fait combien? 86 %. C’est bon, mais rien pour que tes parents pavoisent devant leurs amis : « Mon Daniel a eu 86 % en chimie. » En bas de 90 %, tu te contentes de dire que ton petit prince va bien à l’école sans entrer dans les détails, pour enchaîner avec une analyse des changements climatiques : « On dirait que l’été est décalé, vous ne trouvez pas? »
Mon rapport d’Equifax précise que mon score de crédit est meilleur que celui de 55% des consommateurs canadiens. Ce qui veut dire qu’il est moins bon que le dossier des autres 45%. C’est relativement moyen. Vous savez comment c’est, on trouve habituellement notre satisfaction dans la comparaison avec autrui, comme ces rares fois où notre file avance plus vite que la voisine à l’épicerie.
Donc, je paie rubis sur l’ongle mes comptes et mes dettes et presque la moitié des consommateurs canadiens ont un meilleur score que moi. Ça laisse croire que la situation financière des ménages au pays est moins pire qu’il n’y parait, mais surtout, ça soulève une question: comment font-ils?
Le calcul du score de crédit, au contraire de la chimie, est une science occulte. À part ceux qui en font le commerce, personne ne sait exactement comment ça marche. Equifax et TransUnion (les deux entreprises qui compilent les dossiers de crédit au pays) ne dévoilent pas leur formule sous le prétexte du secret industriel.
On ne sait pas les détails exacts des méthodes de calcul utilisées, mais on connaît néanmoins les grands principes. Voici les aspects qui entrent en compte:
•L’historique de paiement. Payer vos dettes et vos comptes, comme celui du câble ou le cellulaire, avant la date d’échéance est profitable pour votre note de crédit. Les retards de 30 jours vont entacher votre dossier, plus encore si vous dépassez 90 jours.
•Le niveau d’endettement par rapport à la capacité de crédit. Les agences de cotation voient d’un œil suspect des cartes et des marges de crédit utilisées au maximum de leur capacité. Idéalement, mieux vaut ne pas dépasser 50 %.
•Les demandes de crédit. Plus vous faites des demandes, plus votre dossier risque d’être affecté. Si vous magasinez une hypothèque, assurez-vous de concentrer vos démarches dans une période restreinte. Le système ne comptera alors qu’une seule demande.
•Les types de crédit utilisés. Plus vous utilisez des moyens différents d’emprunter, mieux c’est. Si vous avez des cartes de crédit, une marge et une hypothèque, votre dossier s’en portera mieux.
•L’expérience de crédit. Plus vous utilisez le crédit depuis longtemps, plus on pourra cerner votre profil d’emprunteur et votre capacité à gérer vos dettes.
•Faillite et proposition de consommateur. À éviter absolument, car elles entachent un dossier durant six ans, plus encore en cas de récidive.
J’excelle sur tous les aspects, particulièrement les plus importants: l’historique de paiement et le montant des dettes. Bien que le solde de mon hypothèque puisse sembler élevé pour certains (c’est la norme aujourd’hui), j’utilise une infime portion de ma capacité de crédit à la consommation.
Je perds des points sur des détails. Par exemple, mon expérience de crédit n’excède pas 30 ans.
Ma prudence joue également contre moi. Je n’ai qu’une seule carte de crédit et j’ai une aversion pour celles des magasins. Les agences de cotation favorisent ceux qui en ont plusieurs actives. Au-delà de six, cela commence à jouer contre vous. Quatre semble le nombre optimal, pour peu qu’on n’utilise pas plus de 30% de leur capacité.
Morale de l’histoire: pour atteindre la note parfaite, il ne suffit pas d’être studieux, on doit aussi avoir un léger côté bad boy. Il faut prendre des risques et démontrer qu’on sait faire avec.
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La cote de crédit est évaluée sur une échelle de 300 à 900 points. Plus elle est élevée, plus les prêteurs vous font confiance.
Au-dessus de 700 : vous pouvez négocier des conditions avantageuses.
De 500 à 700 : vous obtiendrez un prêt si vous en sollicitez un, mais à un coût plus élevé.
En dessous de 500 : les prêteurs seront réticents à vous prêter. Et s’ils le font, votre marge de négociation sera presque nulle.